Les dragons de vertu n'en prennent pas ombrage | Vous les bons franchouillards, grognons, atrabilaires |
Si j'avais eu l'honneur de commander à bord | Qui si souvent pestez vous plaignant de trop peu |
A bord du Titanic quand il a fait naufrage | De services, épargnez le brave fonctionnaire |
J'aurais crié : ‘Les femmes adultères d'abord !’ | Cinquième roue du char, car il fait ce qu'il peut |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Car, pour combler les vœux, calmer la fièvre ardente | Un jour, à l'Intérieur, désert à l'évidence |
Du pauvre solitaire et qui n'est pas de bois | Un brave homme dormait sur son bureau ciré |
Nulle n'est comparable à l'épouse inconstante. | Clemenceau incita son chef à l'indulgence |
Femmes de chefs de gare, c'est vous la fleur des bois. | Ne le réveillez pas, le pauvre, il s'en irait ! |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Quant à vous, messeigneurs, aimez à votre guise | Car s'ils s'en vont parfois, c'est déjà qu'ils arrivent |
En ce qui me concerne, ayant un jour compris | Et les réveils sont durs à remonter ma foi |
Qu'une femme adultère est plus qu'une autre exquise | Dans les pannes électriques qui de courant les privent |
Je cherche mon bonheur à l'ombre des maris. | Ils arrivent bien tous, oui mais dans quel état |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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A l'ombre des maris mais, cela va sans dire | L'Etat, oui, parlons-en, parlons de l'Etat frère |
Pas n'importe lesquels, je les trie, les choisis. | Que nous imaginons respectant nos consœurs |
Si madame Dupont, d'aventure, m'attire | Ce n'est qu'un phallocrate, macho autoritaire |
Il faut que, par surcroît, Dupont me plaise aussi ! | Au point qu'il interdit de crier : 'Et ta sœur ?' |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Il convient que le bougre ait une bonne poire | La journée de ces dames est longue, il faut comprendre |
Sinon, me ravisant, je détale à grands pas | Que si vous attendez parfois pendant des heures |
Car je suis difficile et me refuse à boire | C'est qu'il faut éplucher des légumes bien tendres |
Dans le verre d'un monsieur qui ne me revient pas. | Qu'ils soient tout prêts, le soir, pour leur autocuiseur |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Ils sont loin mes débuts où, manquant de pratique | C'est à pied, à cheval, parfois même en voiture |
Sur des femmes de flics je mis mon dévolu. | Que vous les emmerdez, les pauvres cheminots |
Je n'étais pas encore ouvert à l'esthétique. | Ces rares jours de grève montrent votre imposture |
Cette faute de goût, je ne la commets plus. | Vous n'avez d'autre choix pour aller au boulot |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Oui, je suis tatillon, pointilleux, mais j'estime | Pensez donc à l'agent, gestionnaire docile |
Que le mari doit être un gentleman complet | L'Etat vous doit un stage et plus rien dans les caisses |
Car on finit tous deux par devenir intimes | Forcé de vous écrire à votre domicile |
A force, à force de se passer le relais | On ne peut vous payer, on n'a pas votre adresse |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Mais si l'on tombe, hélas, sur des maris infâmes | Ce dossier refusé, sans moyen de riposte |
Certains sont si courtois, si bons, si chaleureux | C'est parce que vous vous êtes trompé d'imprimé |
Que même après avoir cessé d'aimer leur femme | Même si c'est celui envoyé par la poste |
On fait encore semblant uniquement pour eux. | Vous auriez dû savoir qu'il était périmé |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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C'est mon cas ces temps-ci, je suis triste, malade | Pour autant n'allez pas vous plaindre car c'est pire |
Quand je dois faire honneur à certaine pécore. | Sans mauvais sang non plus, même pour aguicher |
Mais, son mari et moi, c'est Oreste et Pylade | Car dans tout fonctionnaire, il sommeille un vampire |
Et, pour garder l'ami, je la cajole encore. | Et vous serez exsangue au sortir du guichet |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Non contente de me déplaire, elle me trompe | Quand vous apercevrez, sur le bord d'une route |
Et les jours où, furieux, voulant tout mettre à bas | Trois ouvriers dormant appuyés sur trois pelles |
Je crie : ‘La coupe est pleine, il est temps que je rompe !’ | Alors qu'un autre, lui, travaille à grosses gouttes |
Le mari me supplie : ‘Non ne me quittez pas !’ | C'est qu'une quatrième manquait à l'appel |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Et je reste, et, tous deux, ensemble on se flagorne. | Vous perdez vos papiers, bast, séchez donc vos larmes |
Moi, je lui dis : ‘C'est vous mon cocu préféré.’ | Mais quand vous irez le signaler d'un bon pied |
Il me réplique alors : ‘Entre toutes mes cornes | Ne vous étonnez pas si le brave gendarme |
Celles que je vous dois, mon cher, me sont sacrées.’ | Commence par demander : 'Vous avez vos papiers ?' |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère | Ne jetez pas la pierre à un seul fonctionnaire |
Je suis derrière... | Y en a derrière... |
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Et je reste et, parfois, lorsque cette pimbêche | J'arrêterai ici cette trop longue liste |
S'attarde en compagnie de son nouvel amant | Vous l'auriez deviné, je n'en crois pas un mot |
Que la nurse est sortie, le mari à la pêche | Il faut rire de tout, je suis un humoriste |
C'est moi, pauvre de moi, qui garde les enfants. | Fonctionnaire moi-même, et j'écris du bureau. |
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Ne jetez pas la pierre à la femme adultère. | Ne jetez pas la pierre au brave fonctionnaire. |